Sophie Huberson, Déléguée Général, SNELAC
Pouvez-vous nous présenter le SNELAC, son rôle et ses activités ?
Le Syndicat National des Espaces de Loisirs d’Attractions et Culturels a été créé en 1983. C’est en 1994, à l’initiative du Parc Astérix, que le syndicat professionnel est devenu syndicat patronal et a évolué en 2000 pour être ce qu’il est aujourd’hui : nous avons alors eu un élargissement de notre champ d’application à tous les sites culturels et de loisirs. Je suis à la tête de ce syndicat depuis 19 ans. Nous sommes une équipe de huit personnes, structurée en un pôle d’exploitation, un pôle social et un pôle d’influence. Nous rassemblons cinquante cent vingt trois adhérents autour d’un seul métier : le divertissement. Nous sommes un jeune secteur et fédérons différents segments : les parcs d’attractions, les parcs de loisirs ludo-pédagogiques, les parcs animaliers et toute la branche culturelle avec les musées et châteaux privés. Nous avons cinq missions : fédérer et animer un réseau, apporter des informations, proposer à nos exploitants un support au travers de commissions thématiques, diffuser une communication adaptée et pertinente et enfin, faire le lien avec toutes les instances institutionnelles. Notre syndicat a une spécificité, nous sommes à la fois un syndicat professionnel et une organisation patronale. Nous avons les très grands fleurons de l’industrie mais aussi un tissu de PME très fort qui n’est pas nécessairement très connu au niveau national. Ce sont des pôles d’attractivité du territoire avec des retombées très importantes.
Quels sont les liens mis en place avec le tissu commerçant local et les territoires ?
Tout dépend de la stratégie interne de l’entreprise qui exploite ces sites de loisirs. On ne se rend pas uniquement dans un parc de loisirs. Dès lors qu’un site est implanté dans une zone, nous créons des liens avec le commerce local. Il faut voir cela en termes de parcours, il y a un cercle vertueux qui a permis à tous ces équipements de se développer. On est d’ailleurs passé de la simple visite au mini-séjour. Cela permet de prolonger et d’augmenter l’expérience avec une très forte rupture pour les clients tout en faisant un lien avec le tissu local. En effet, tout le tissu local en profite, le commerce et l’hébergement se développent alors. Nous sommes un des rares secteurs d’activités en France qui génère beaucoup d’emplois, sans nécessairement de qualification. C’est un emploi certes souvent saisonnier mais où les gens vivent sur place.
Concernant les emplois saisonniers, est-ce un risque ou un atout pour l’accueil des visiteurs ?
J’insiste sur la différence de saisonnalité qu’il y a par rapport à d’autres secteurs du tourisme. Dans notre secteur, il y a une fidélisation des saisonniers. Sauf la population étudiante, qui pour des raisons propres est ponctuelle, les saisonniers reviennent chaque année. Nous avons d’ailleurs une convention pour limiter la précarité des saisonniers c’est-à-dire qu’au bout de trois saisons dans un parc, l’employeur a l’obligation de vous proposer un CDI d’intermittent. Il y a une collaboration avec la région et le tissu économique local pour essayer de trouver une complémentarité objective en hiver à ce CDI. Cela s’est fait par exemple dans l’est de la France avec le parc Walibi. Deuxième élément différenciant, nous proposons hors saison des formations à ces saisonniers pour qu’ils puissent monter en compétences et s’intégrer plus durablement au secteur. Nous avons sorti il y a deux ans une cartographie des métiers, nous avons sept familles de métiers et l’idée est de faire passer des formations diplômantes. Nos saisonniers ont donc une bonne connaissance de l’entreprise et nous avons tout un dispositif pour intégrer les nouveaux arrivants.
Quels sont les enjeux du parcours clients pour bien accueillir le voyageur ?
Cette réflexion se fait très en amont. En premier lieu, il faut attirer les visiteurs et les faire revenir. Il faut que le site soit en capacité de donner envie aux gens de venir et cela passe par une très forte communication. Via le site internet mais aussi via une communication papier : flyers, affiches, etc. Il faut aussi attirer les groupes : une part importante de la clientèle vient en groupe. Tout cela est mue par le renouvellement de l’attractivité donc nos exploitants réinvestissent environ 20 % de leur chiffre d’affaire pour des nouveautés. 70 % de la clientèle est à moins de deux heures du site, il faut les faire venir mais il faut surtout les faire revenir et les fidéliser. Une autre dimension est très importante, c’est celle du spectacle vivant, ce n’est pas seulement un décor, c’est également la capacité à répondre aux attentes individuelles tout en répondant aux attentes du groupe. Cela permet aussi de libérer les attractions durant un temps et surtout, de partager les émotions. C’est cette rupture avec le quotidien qui fait le succès de ces parcs. Cela fait maintenant partie du mode de consommation de loisirs des français.
Vous parliez des groupes, comment est géré l’accueil de cette clientèle?
La clientèle de groupe est très intéressante d’un point de vue business. Il y a des offres spécifiques adaptées à toute cette clientèle car il y a une complémentarité objective en terme d’agenda. De plus en plus de parcs installent des salles de séminaires et permettent aux entreprises de venir travailler le matin et de profiter des installations l’après-midi. A noter également que cette clientèle apporte du volume avec des billets datés qui permettent de mieux organiser l’exploitation du site et d’améliorer la gestion de flux et les files d’attentes. Sur ce sujet, nous voyons apparaître de plus en plus d’applications de gestion de files d’attente, elles servent à donner des informations aux visiteurs mais permettent aussi de jouer entre visiteurs pendant qu’ils attendent. Cela vient du Nord de l’Europe, on crée de l’animation de file d’attente, on transforme un moment frustrant en expérience plus positive. Il y a toujours des animations de rues et des comédiens, ils mettent en place des solutions assurantielles pour sécuriser leur saison. La météo peut être vitale pour eux.
Comment sont gérés les aléas climatiques afin de ne pas nuire à l’expérience client ?
Pour la canicule, nous n’arrêtons pas de “brumatiser” nos visiteurs. Cela relève de la santé publique. De plus en plus d’adhérents installent des fontaines sur leur site, ce sont des éléments de confort mais aussi de santé. Quand nos adhérents le peuvent, ils couvrent leurs attractions et se prémunissent alors des intempéries. Les impacts des messages de la communication étatique ont parfois des effets un peu pervers et font baisser la fréquentation des sites. Nos exploitants renforcent alors leur communication au jour le jour pour manifester leur présence et leurs solutions. Pour certains segments qui ont une durée d’ouverture très courte, je pense par exemple aux parcs aquatiques.
A l’inverse, comment sont gérées les périodes de surfréquentation pour continuer à proposer une expérience agréable aux visiteurs ?
Cela se passe à tous les niveaux. Il y a un double parcours, celui vu sous l’angle marketing et celui vu sous l’angle de la sécurité. Chaque maillon de ce parcours est travaillé de telle manière que la qualité et la sécurité soient toujours au rendez-vous. Il y a un renfort des équipes d’accueil lors des pics de fréquentation. On ne peut pas accroître la capacité d’une attraction mais on peut en revanche essayer de faire en sorte que la gestion de flux soit la plus fluide possible, notamment avec l’accroissement des spectacles. Cela fait partie du métier de l’exploitant et il y a aussi un très gros travail effectué dans le traitement des réclamations. Tous les exploitants prennent le temps de répondre à cela. C’est très important, l’expérience de visite se transmet par bouche à oreille, les meilleurs ambassadeurs sont les clients donc l’obsession des exploitants est la satisfaction des clients. De nombreux items sont surveillés de près avec des réflexions pour cibler les axes d’amélioration. On reprend la même chaîne d’un point de vue sécurité, c’est fondamental. Il ne doit y avoir aucun doute sur le capital confiance du parc. En 2018, sur 63 millions de visites, nous avons eu 25 blessés. C’est un taux qui est proche de zéro mais cela reste vingt cinq accidents de trop, inacceptables pour les visiteurs et aussi pour les collaborateurs. La qualité de l’expérience vient du principe fondamental de sécurité.
Quelles sont les réflexions pour accueillir les visiteurs en situation de handicap ?
Nous avons une commission handicap. Nous avons signé une charte en 2003 sur l’accessibilité de nos parcs et nous sommes en train de la réviser pour inclure l’autisme. Nous sommes un des secteurs du tourisme les plus avancés en termes d’accessibilité même si globalement, la France est très en retard, il y a donc encore beaucoup à faire. Nous réalisons beaucoup d’efforts mais restons humbles. Aujourd’hui, au niveau constructeur, c’est dans le cahier des charges dès le départ.
Dans le cadre de notre commission RSE, nous travaillons sur l’accueil des personnes en fragilité, qu’elles soient en fragilité temporaire ou permanente. Cela a, par conséquent un impact sur l’ensemble des visiteurs.
Au niveau social, y a-t-il des choses mises en place pour l’accès à la culture et au divertissement ?
Il s’agit là d’un point qui relève du service public. Il concerne essentiellement les parcs à dominante culturelle où il y a des conventions qui sont passées avec une véritable mission de services publics qui permet à une certaine population d’avoir des tarifs préférentiels. Même pour les entreprises privées, il y a des offres mises en place. Les parcs de loisirs accueillent une clientèle essentiellement populaire.
Avez-vous des liens avec des espaces de loisirs à l’international pour échanger sur des bonnes pratiques ?
Le SNELAC est adhérent de International Association of Amusement Parks and Attractions qui fédère l’ensemble des parcs de loisirs. Nous réunissons tous les fournisseurs lors d’un salon. Le SNELAC est l’organisation la plus importante au niveau européen, nous avons pris le lead en matière de sécurité et partageons donc tout ce que nous faisons sur ce point. On met aussi en place des labels RSE concernant les trois piliers : environnement, social et économique. Nous faisons en 2020 une expérimentation avec 20 adhérents qui vont passer un audit sur une centaine de critères RSE. Toute cette dimension prospective est vraiment au coeur des préoccupations de nos exploitants.