La labellisation comme structuration d’un engagement responsable

Anne-Lise OLIVIER

Poste : Coordinatrice de l'association, Acteurs du Tourisme Durable (ATD)

Pouvez-vous nous rappeler les missions d’ATD ?

L’association ATD – Acteurs du Tourisme Durable -, créée il y a une dizaine d’années, a pour mission d’accompagner l’ensemble du secteur touristique dans sa transition écologique et sociale. ATD est convaincue qu’aujourd’hui, face à tous les défis environnementaux et sociétaux actuels, le tourisme doit se réinventer et trouver de nouvelles solutions. ATD est un réseau de professionnels soit un peu plus de 200 à 300 membres qui représentent différentes structures, tous secteurs d’activité confondus : hébergeurs, tour-opérateurs, consultants, médias, écoles, etc. Nos principales missions sont de fédérer les professionnels autour de la transition écologique, de les informer, de les encourager à partager les bonnes pratiques, à diffuser de l’information, produire des ressources, promouvoir et mettre en valeur des initiatives, etc. On n’est pas un organisme de formation, mais la formation passe par les rencontres, les séminaires et la sensibilisation. Enfin, on a un rôle de représentation du secteur auprès des pouvoirs publics, des instances ou des institutions. On est régulièrement en contact avec différents ministères ou l’Ademe, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. On a aussi ce rôle de médiateur entre ces institutionnels et les professionnels que nous accompagnons. Cela nous permet de faire remonter des informations et de redescendre certaines grandes décisions.

 

Comment vous assurez-vous de l’engagement de vos adhérents ?

L’adhésion qui est validée par un conseil d’administration demande un minimum d’engagement, de volonté et de motivation pour intégrer cette dimension durable dans leurs activités. Cela se concrétise par une charte d’engagement pour les adhérents du réseau qui permet de valoriser cet engagement. L’idée reste quand même d’intégrer le plus grand nombre d’adhérents, y compris ceux qui font peu, mais qui ont cette volonté de progresser.

 

Vous avez édité au printemps 2022 un guide des démarches de labellisation pour un tourisme durable. À partir de quel moment dans vos actions avez-vous ressenti la nécessité d’accompagner les professionnels sur ces démarches ?

C’est une idée qui a émergé il y a peu près deux ans au sein du conseil d’administration parce qu’on percevait bien que les professionnels, nos adhérents notamment, ne s’y retrouvaient pas forcément dans cette jungle des labels. Ils voulaient aller dans cette voie du tourisme durable, ils ressentaient le besoin de se raccrocher à des labels, mais en même temps, on les sentait démunis face à tous ces labels. De plus, on sait que tout ce qui engendre des coûts humains et financiers peut constituer des freins, par exemple pour un tout petit hébergement qui a peu, voire très peu de personnel. Pour s’engager dans une telle démarche, il faudrait idéalement une personne dédiée. Dans tous les cas, notre rôle est de rediriger ces acteurs vers le bon opérateur, notamment les territoires, les offices de tourisme, les comités régionaux de tourisme qui s’engagent de plus en plus dans cet accompagnement durable.

 

Ces labels sont donc structurants pour s’engager dans une démarche responsable ?

C’est vraiment tout l’objectif, même plus que celui de devoir afficher quelque chose, car les labels ne sont pas encore bien connus du grand public. Un label permet vraiment d’engager une démarche, de s’améliorer d’année en année et d’avoir un chemin à suivre avec des critères bien précis. Cela permet aux équipes de se fédérer autour d’un projet. Cela crée une émulation autour d’une démarche plus globale RSE. A noter également, c’est que certains critères peuvent anticiper les normes et réglementations qui viendront quelques années après. Cela leur permet aussi d’anticiper, de se mettre aux normes quelques années avant les autres.

 

Dans votre guide, avez-vous identifié un label qui se démarque des autres ?

Nous, ce qu’on a voulu mettre en avant à travers ce guide, c’est la particularité de chacun des labels en précisant en quoi chacun avait sa place. En réalité, pour un hébergeur, il va avoir le choix entre deux ou trois principaux et ce guide permet aux professionnels d’être accompagnés dans leurs choix en fonction de leurs critères. Pour rester neutre dans la construction de ce guide, on a questionné les labels par rapport aux objectifs de développement durable. On montre que certains labels sont plus ou moins exigeants sur tel ou tel engagement ODD. Cela montre surtout que les labels ne mettent pas le curseur au même endroit. Un pro qui voudra s’engager sur des critères plus sociaux ira sur des labels correspondants.

 

Ces labellisations influencent-elles vraiment le choix des voyageurs dans la réservation de leurs prestations touristiques ?

Difficile à savoir, mais Auvergne-Rhône-Alpes Tourisme avait sorti une étude en 2021 avec quelques questions sur ce sujet-là et on voyait qu’il y avait encore du chemin à parcourir niveau grand public. Pour citer quelques chiffres, dans les critères de durabilité pour leur choix sur l’hébergement, la labellisation est une priorité pour seulement 1 Français sur 10. 35% des Français ne connaissent aucun label et seulement 1/3 déclarent avoir déjà vu des offres estampillées d’un label. Or, pour le professionnel qui s’engage là-dedans, il y a quand même un objectif de reconnaissance et de visibilité. Il y a donc un gros travail à faire de la part des labels et des professionnels labellisés pour se faire connaître et valoriser leurs engagements.

 

Une vision commune du tourisme durable ? Possible ou pas ?

Ce qui est sûr c’est que du point de vue des indicateurs utilisés, il y a un gros travail à faire pour définir un engagement commun. Notamment pour une destination par exemple qui continue aujourd’hui de mesurer sa performance au nombre de visiteurs étrangers… Nous, justement, dans notre rôle de plaidoyer et notre travail avec les institutionnels, on a vraiment ce souhait de réviser ces indicateurs pour la destination France. Si on arrive à obtenir ça, on sera sur une démarche structurante pour traduire un engagement de tourisme durable. C’est une notion très large et d’un type de professionnel ou d’un territoire à un autre, il n’est pas défini de manière identique c’est parfois compliqué de s’y retrouver, mais si déjà au niveau de notre ministère de tutelle, on avait un cadre, ça pourrait aider. Si on va dans ce sens-là, ça serait bien.