Virginie Rouault, Director of Sales Europe, CitizenM
Pouvez-vous nous présenter l’évolution de CitizenM en France et votre rôle au sein de la chaîne ?
En France, nous avons trois établissements CitizenM. Le premier, ouvert en 2015, était à l’aéroport Charles de Gaulle. Depuis, il y en a un à La Défense et un Gare de Lyon. J’ai rejoint l’entreprise en 2017, lors des deux dernières ouvertures en tant que directrice des ventes France pour développer toute la partie commerciale, c’est-à-dire une page blanche à l’époque. Il n’y avait pas d’équipe commerciale dédiée en France. Nous étions commercialisés via les OTA. L’objectif était de créer une relation commerciale durable avec les entreprises clientes, et cela, pas uniquement d’un point de vue français mais aussi d’un point de vue global afin de commercialiser l’ensemble de la chaîne auprès des entreprises et des voyageurs d’affaires. Ma responsabilité est donc de commercialiser l’ensemble de la chaîne. J’ai donc un rôle local / global très fort. Nous avons 14 établissements en Europe, je manage la commercialisation de l’ensemble. Nous sommes présents à Glasgow, Londres, Paris, Zurich, Copenhague, Rotterdam, Amsterdam et la prochaine ouverture européenne est prévue en juin, à Genève !
Comment vous positionnez-vous dans le secteur de l’hébergement ?
Nous sommes un peu seuls dans notre façon de procéder. En termes de marques et de concept, nous ne voulons pas nous comparer, nous ne nous positionnons pas par rapport aux autres mais par rapport à ce que nous sommes et à ce que nous souhaitons proposer.
Qu’est-ce qui fait votre succès et votre différence dans l’hôtellerie urbaine ?
Le succès principal vient de l’approche dès la conception de l’établissement. Il faut savoir que Rattan Chadha et Michael Levie les fondateurs n’étaient pas dans l’industrie hôtelière. Il est parti des frustrations des voyageurs de son entreprise. Il est donc parti de ces besoins. Il a abordé chaque frustration et y a apporté une solution. Par exemple, si on parle de la lenteur du check in, le voyageur d’affaires veut quelque chose d’efficace. Chez nous, nous avons pensé cette démarche de manière totalement différente et nous proposons une approche 100 % digitale avec un self check in réalisable en moins de 60 secondes, avec plusieurs bornes disponibles. Nos équipes d’ambassadeurs sont dédiées à la relation client et sont déchargées de tout ce qui est administratif, particulièrement la gestion téléphonique de l’administratif. Nous avons vraiment utilisé la technologie au service de l’humain. C’est ce cheminement complet qui nous a permis de créer chaque espace de l’hôtel mais aussi chaque instant du parcours client au sein de l’établissement. Cela permet d’éliminer toutes les frustrations et de repenser les règles hôtelières lorsqu’un collaborateur se déplace. Notre modèle est à l’inverse de la tendance actuelle puisque nous détenons l’ensemble de nos murs et pouvons ainsi avoir un contrôle global de notre proposition. Notre écosystème est tourné vers notre marque. Notre accueil est le même partout, dans tous nos établissements. Nous sommes une marque avant d’être un hôtel.
Comment travaillez-vous pour avoir une homogénéisation globale dans tous vos établissements ?
Nous avons un partenaire unique qui nous accompagne dans le design et la décoration de nos établissements. C’est notre façon de travailler. À tous les niveaux, nous nous inscrivons dans des partenariats sur du long terme et fidélisons nos fournisseurs qui deviennent des partenaires. Nous voulons personnaliser sous un angle technologique et digital. Tout ce qui est automatisable doit l’être. Tous nos hôtels sont centralisés d’un point de vue technologique, c’est très ancré dans notre approche. Tout est fait de manière homogénéisée. Un employé dans un hôtel à Genève peut vérifier une disponibilité à New-York. Cela améliore l’expérience de nos clients aussi de nos employés et renforce l’aspect global de notre marque.
Comment arrivez-vous à homogénéiser cet esprit d’accueil auprès de vos collaborateurs ?
Dès le recrutement, nous recherchons des gens qui se reconnaissent dans l’ADN de la marque et ont une réelle passion pour la mission que nous portons au sein de l’industrie, notamment pour nos ambassadeurs. La personnalité est un élément clef du recrutement et nous ne recrutons pas nécessairement des personnes qui viennent de l’industrie. C’est la personnalité qui fera la différence. Ce mode de recrutement crée une réelle différence dans les interactions avec les clients et même en interne, cela crée une dynamique totalement différente.
Quel rôle pour les espaces communs au sein de vos hôtels ?
Les espaces communs sont dédiés au lieu de vie. Il y a en deux univers complètement distincts et la chambre n’est pas le lieu de vie mais le cocon. Nous veillons à ce qu’il y ait tout le confort nécessaire pour passer une bonne nuit et avoir un réel moment de pause. Le lit et la partie divertissement sont d’excellente qualité. C’est aussi pour cela que nous ne proposons pas vraiment de room service. L’hôtel n’est pas pensé comme un lieu où l’on passe seulement pour dormir. Nos clients réguliers en font d’ailleurs une habitude et des liens se créent avec nos ambassadeurs. Cela est encore plus fort avec les clients anglo-saxons car c’est plus dans leurs mœurs que ce que l’on peut constater en France.
Concevez-vous un accueil différent s’il s’agit d’un client loisir ou d’un client affaire ?
Absolument pas, le traitement est identique. Quel que soit le canal par lequel il a réservé, le client est le même.
Injectez-vous votre philosophie dans votre activité événementielle ?
Nous avons des petites salles de réunion et accueillons donc des petits événements. Nous restons dans un format à taille humaine sur les groupes et les événements reçus. Nous avons tendance à protéger notre marque et n’accueillons que des groupes de tailles raisonnables pour ne pas avoir d’impact sur la vie de l’hôtel et dénaturer l’expérience de nos clients. Cette mission, nous l’avons toujours en tête dans nos développements commerciaux.
Travaillez-vous avec les territoires lorsque vous implantez un hôtel et ensuite, tout au long de votre fonctionnement ?
Non, pas vraiment, nous sommes assez indépendants. Nous appliquons notre modèle quel que soit l’endroit mais nous aurons des spécificités locales.
Comment fonctionnez-vous sur la partie restauration ?
Nous utilisons en partie des circuits courts et aussi des centrales d’achats. Nous avons une équipe qui a pour vocation d’apporter une couleur locale et une approche en circuits courts. Là encore, l’arrivée de la France a eu un impact fondamental dans cette démarche, notre culture a permis une véritable point de prise de conscience. Nous sommes tout de même à chaque fois influencés par la culture du pays. Forts de cette prise de conscience, nous avons pris en compte cette problématique et développé nos équipes en ce sens.
Vos lieux d’implantations sont proches des gares qui sont aussi des lieux d’accueil. Est-ce que dans votre stratégie, vous vous voyez comme une prolongation des lieux d’accueil liés au transport ?
Oui, en quelque sorte, nous nous voyons comme un espace assez ouvert. Nous avons aussi une offre de coworking donc l’hôtel n’est pas ouvert qu’aux clients de l’hôtel, c’est un lieu de vie qui peut s’ouvrir à la communauté aux alentours et c’est en cela que nous sommes une prolongation de l’accueil. Nous ne nous implanterons pas dans un lieu où il n’y a pas cette possibilité ni cette dynamique.
Votre offre de coworking est-elle une offre formalisée ou est-ce le fait que vos espaces soient agréables qui font que l’espace se crée naturellement ?
Le coworking s’est créé naturellement mais il dénaturait l’expérience du lobby pour les clients de l’hôtel. Il a donc fallu le formaliser pour mieux gérer les flux. Nous proposons aujourd’hui un pack en volume d’heures aux personnes qui arrivent dans l’hôtel sans en être client.
Quelle stratégie avez-vous mise en place pour accueillir le client dès qu’il va sur votre site, avant même que le processus de réservation ne soit enclenché ?
L’objectif est qu’il se retrouve notre univers dès qu’il arrive sur notre site Internet, qu’il puisse avoir des facilités de réservations assez poussées. La réservation se fait en quelques clics. Nous sommes en plus disponibles sur l’ensemble des canaux de réservation. Nous avons une stratégie très centralisée. Nous sommes disponibles sur notre site Internet, les OTA et sur la partie business travel. Nous travaillons très peu sur l’offre loisirs donc nous sommes peu présents sur les outils dédiés au voyage de loisirs.
Les dispositifs liés à l’accueil (corners d’achat, services additionnels….) rentrent-ils dans une politique de rentabilité des coûts et de revenue management au sein de la chaîne ?
Non. Nous avons plus une approche communautaire. Nous recherchons comment nous pouvons apporter quelque chose en plus. Nous ne sommes pas du tout sur une optimisation de revenus sur ce point-là.
Quels sont vos prochains développements ?
VR : Notre prochain challenge sera aux États-Unis. C’est un marché différent. Aujourd’hui, nous avons deux hôtels, l’un à New-York et l’autre à Boston, qui ont ouvert quasiment simultanément et nous allons en ouvrir un autre bientôt à Seattle. C’est un nouveau marché qui reste une étape importante pour CitizenM.
Nous sommes une chaîne très tournée vers les voyageurs d’affaires qui représentent 73 % de notre clientèle. Cela impacte énormément notre stratégie de développement. Nous n’ouvrirons pas dans des villes secondaires, en France ou ailleurs. Nous avons en revanche vocation à ouvrir plusieurs établissements au sein des capitales. Trois établissements sont par exemple prévus à Paris.